Homélies/Méditation

Préparons les chemins du Seigneur

Pour ce deuxième dimanche de l’Avent, l’Abbé Willy nous explique très clairement ce que nous devons faire pour nous préparer à accueillir Jésus qui lui “est lui-même l’incarnation de l’humilité. Il est, lui, doux et humble de cœur”. Purifions-nous en trouvant notre désert.

Lc 3, 1-6 En ce deuxième dimanche de l‘Avent, nous nous engageons sur le chemin de l’Espérance. L’Avent est comme un grand chantier : de grands travaux sont nécessaires (abaisser les collines, combler les vallées…) pour faire place à Celui qui vient, et lui préparer le chemin de nos cœurs, pour voir le salut de Dieu. Jean Baptiste se trouve au coeur de la liturgie des 2e et 3e dimanches de l’Avent. La semaine prochaine, nous entendrons son message, son appel à la conversion. Aujourd’hui c’est de sa mission de prophète qu’il s’agit. Pour décrire cette mission, Luc cite la prophétie d’Isaïe : «Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées; les passages tortueux deviendront droits, les routes déformées seront aplanies ; et tous les êtres humains verront le salut de Dieu.»

Comme tous les évangiles, celui de S. Luc n’est pas un reportage historique mais un témoignage de foi. Pourtant, la méticulosité avec laquelle il situe le cadre historique de l’activité de Jean Baptiste donne au récit un caractère très incarné dans le temps et dans l’espace. On voit défiler solennellement les têtes couronnées de l’époque : l’empereur Tibère, le préfet Ponce Pilate, les roitelets de la région Hérode, Philippe et Lysanias, les pontifes Anne et Caïphe. Cette longue liste nous fait sourire : Jean Baptiste à côté des grands de ce monde fait pâle figure. Mais, après deux mille ans, Jean Baptiste est toujours écouté, imité, célébré, alors que les statues de Tibère, l’empereur tout-puissant, croupissent dans de rares musées, rongées par le temps et l’indifférence générale.

Que sont devenus les grands de ce monde : Alexandre, César, Charlemagne, Louis XIV, Napoléon? Connaîtrait-on seulement l’existence de Ponce Pilate et d’Hérode sans le récit des évangiles? Quelle place tiennent les grands de ce monde dans le coeur des gens? Dans cent ans, qu’en sera-t-il de nos dirigeants les plus populaires? Ils occuperont peut-être quelques centimètres carrés au Panthéon de la gloire.

Après avoir souligné l’aspect éphémère des grands de ce monde, Luc met l’accent sur la parole de Dieu qui se fait entendre, non par l’empereur romain, ni par le gouverneur de Galilée, ni par les tétrarques du temps, ni par les grands prêtres du Temple, mais par Jean le baptiste. Cette parole de Dieu «descend» sur le fils de Zacharie, dans le désert qui est synonyme de silence. Dans notre société actuelle le silence devient un vrai luxe. Le bruit nous envahit de tous côtés.

Retrouvons le silence dans nos vies pour mieux chercher et trouver le Christ, dans la Parole de Dieu, la prière, l’adoration du Saint-Sacrement, les sacrements ; l’Eucharistie sûrement et celui de la Réconciliation. Et n’oublions pas le « sacrement du frère », j’entends par-là en favorisant la fraternité et le partage. La Parole de Dieu nous parviendra à travers les siècles grâce à ce prophète du Seigneur. Encore aujourd’hui, c’est souvent grâce à des gens très simples : ceux et celles qui visitent les malades, ceux et celles qui s’occupent de leurs parents malades, ceux et celles qui apportent la communion, ceux et celles qui partagent leurs faibles revenus, que nous parvient la parole de Dieu ! Le désert où se trouve Jean baptiste est aussi un lieu de dépouillement où les titres et les privilèges disparaissent, où chacun et chacune se dévoile tel qu’il est, dans toute sa nudité, en retrouvant sa propre identité. 

Saint Luc dit : la parole de Dieu «descend sur Jean». Toute la période de l’Avent tient dans ce mot : «recevoir la parole de Dieu», écouter cette parole qui transforme, qui fait de nous des femmes et des hommes nouveaux. L’évangile d’aujourd’hui confirme ce que Paul dira aux Romains : «La pédagogie de Dieu choisit ce qu’il y a de plus faible pour confondre les forts».

Hier comme aujourd’hui, l’Histoire avance grâce à des hommes et des femmes de charisme qui ont écouté la parole de Dieu :

– au 6e siècle, saint Benoît, à travers ses monastères, évangélise l’Europe;
– au 13e siècle, François d’Assise, qui n’a vécu que 26 ans,  change radicalement l’Église de son temps;

– au 14e siècle, Catherine de Sienne, ramène le pape Grégoire XI d’Avignon à Rome;
– au 16e siècle, Antoine Marie Zacharie, Thérèse d’Avila et Ignace de Loyola renouvellent la vie religieuse;

– au 19e siècle, le Père Damien ravive la foi et l’espérance des foules;
– ces dernières années, Teresa de Calcutta donne un nouveau visage à la tendresse de Dieu.

La parole de Dieu est descendue sur ces héroïnes, sur ces héros, et le monde a été transformé. Aujourd’hui, la parole de Dieu «descend sur chacune et chacun d’entre nous».

Jean le Baptiste, en reprenant les paroles du prophète Isaïe, nous invite à bien préparer le chemin du Seigneur. Les collines et les vallées, ne sont-elles pas en chacun de nous ? Comment pouvons-nous accueillir Celui qui vient en nos cœurs tout déformés ? Ne sommes-nous pas un peu comme la terre, ce pâton d’argile que le potier a façonné avec ses imperfections…

Ce corps « glaiseux » comme nous en parle si bien Alexia Vidot dans son livre : « Éloge spirituel de l’imperfection » ; ce corps de glaise qui sans cesse a besoin d’être façonné, d’être plongé dans ce baptême de conversion en vue du pardon des péchés. Dans la bible, la glaise est utilisée pour désigner « abaissement » et « humilité ». Et voilà qui change tout dans la compréhension des textes de ce dimanche. Nous rendre humbles. 

De nos jours, combien d’obstacles encore gênent la marche du Seigneur sur le chemin qui va vers nous et vers les autres : les rugosités de notre caractère, les déviations de notre foi, les fossés d’incompréhension entre les hommes, les montagnes de préjugés et d’indifférences, les sinuosités de tous nos mensonges, les fossés créés par le racisme et les différences sociales, les jalousies.  Oh, si dans tout ce relief tourmenté d’un monde raviné par le péché, une route large, droite, aplanie pouvait aller jusqu’au cœur de chacun afin que le jour de Noël, le Seigneur puisse l’emprunter sans difficultés pour aller jusqu’à notre cœur, jusqu’au cœur du monde contemporain afin que tout homme puisse voir le salut de Dieu !

Dans la tradition juive, le désert c’est vraiment le lieu de la purification dans l’humilité et l’abaissement. Rappelons-nous que l’humilité n’est pas une qualité morale; C’est l’attitude fondamentale du croyant, c’est un combat de tous les jours, tant que nous nous placerons plus haut que là où nous sommes. Le Christ ne cesse de nous appeler à ce combat de l’humilité : « Heureux les pauvres de cœur : le royaume des cieux est à eux » « Quiconque s’élèvera sera abaissé, quiconque s’abaissera sera élevé ».

Mais il y a plus : Jésus est lui-même l’incarnation de l’humilité. Il est, lui, « doux et humble de cœur ». 

Il est tout entier humble devant son Père et il accepte de ne vivre que de lui. Il est tout entier humble devant ses frères et sœurs en humanité et accepte tout pour eux. Alors, en tout temps, et tout particulièrement en ce temps de l’Avent, temps de l’attente, vivons l’humilité même du Christ, ayons le courage d’abaisser les montagnes de nos suffisances. Comblons les ravins de nos lacunes et de nos péchés, pour qu’il ait, Lui toute sa place en nos cœurs.

En cette solennité de l’Immaculée Conception 8 décembre, nous nous adressons à la Vierge Marie avec cette prière :

Ô Marie, Mère de Dieu, dotée de la plénitude de la grâce dans ta glorieuse Immaculée Conception, unique parmi les femmes en ce qu’elle est à la fois mère et vierge, Mère du Christ et Vierge du Christ, nous te demandons de nous regarder avec un cœur tendre de ton trône et d’écouter nos prières. Prépare toi-même dans le désert de notre cœur le chemin de la venue de ton Fils. Les collines de notre orgueil, abaisse-les par ton humilité. Les vallées du désespoir, comble-les par ton espérance. Ö Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à Vous. Amen.

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