Confinement, l’ombre et la lumière
Petit témoignage de notre vie de famille en confinement.
Chèrs amis,
Comment vous décrire ce que nous vivons en famille, moi, Fabien et les 4 enfants depuis 8 semaines confinés dans notre maison ? C’est qu’il se passe beaucoup de choses chaque jour, bonnes et moins bonnes et que chaque membre de la famille a un vécu différent.
Chaque membre de la famille a un vécu différent
Fabien fait du télétravail à temps plein et s’est installé un petit coin bureau dans notre chambre. Il a reçu une nouvelle mission temporaire et a beaucoup plus de travail que d’habitude. Il parvient assez bien à gérer la différence entre les moments de travail et les moments en famille ou d’aide aux devoirs. Moi j’ai plus de mal avec le télétravail en présence des enfants mais (heureusement ?) mon travail se trouve diminué et je suis à mi-temps en chômage temporaire depuis la semaine 3.
En ce qui concerne les enfants, ils sont surtout très contents de ne pas devoir aller à l’école. Pour eux c’est un peu comme de très longues vacances, sauf qu’il y a les devoirs à distance en plus. Je suis épatée de leur capacité à s’adapter aux nouveautés ! Contrairement à nous qui expérimentons une privation de liberté, les enfants eux découvrent une immense liberté, et en jouissent beaucoup. Ils développent leur autonomie, apprennent le vivre-ensemble et plein de nouvelles choses. Je crois sincèrement que nos enfants vivent un temps béni et je suis consciente de la chance énorme qu’ils ont vis-à-vis d’autres familles.
J’ai l’impression d’être dans un pays étranger
Pour ma part je vis les choses un peu plus difficilement. Je n’arrive pas à m’adapter à cette nouvelle manière de vivre qui nous est imposée. Au lieu de m’habituer avec le temps, je la trouve de plus en plus pénible. J’aspire au retour à la vie normale !
Les enfants ne voient pas ce qu’il se passe à l’extérieur, ils restent malgré tout dans un environnement connu. Moi j’ai l’impression d’être dans un pays étranger où tout est différent, où je n’ai plus mes repères. En dehors de la maison, j’ai continuellement le sentiment d’être en délit sans savoir ce que je fais de mal. À tout moment quelqu’un va me crier dessus pour me dire « NOOON ce n’est pas comme ça qu’il faut faire ». C’est un peu angoissant, tout est nouveau.
Plein de nouveaux sujets sur lesquels nous mettre en désaccord
A l’intérieur de la maison, le rythme est ralenti, on a beaucoup plus de temps en famille, c’est bien. C’est même super bien. Mais on n’est pas habitué ni équipé pour vivre et travailler tous les six 24h/24h ensemble. Il faut supporter davantage les différences des uns et des autres. Et les sauts d’humeur de chacun. Et l’irritabilité se trouve augmentée… De nouvelles difficultés apparaissent et Fabien et moi découvrons plein de nouveaux sujets sur lesquels nous mettre en désaccord. La gestion (ou non) des écrans, le degré de permissivité, les horaires, la distribution des tâches, même la liberté nouvelle des enfants, sont autant de sujets de discussions. Et de négociations avec eux. Nous devons repenser nos règles de vie, nos habitudes, nos priorités, avec une sacré dose de lâcher prise.
Pour moi ce temps de « stop » imposé et de privation de liberté fait remuer des choses pas toujours agréables. Je bascule 100x par jour entre les bienfaits et les difficultés de cette période particulière. En ce temps de crise, tout est amplifié : les bons moments sont devenus extrêmement bons, les difficultés sont devenues extrêmement difficiles. Je redécouvre mes limites et mes défauts, en plus intense. Je suis plus vulnérable, ma tête se remplit d’idées sombres que j’essaie de chasser en m’adressant au Seigneur. Heureusement ça marche ! Mais il faut trouver la force de s’adresser à Dieu jour après jour. Et ça, ce n’est pas gagné.
La messe à la maison, ne nous réussit pas trop
Ce temps de confinement n’est pas très favorable à ma vie de prière. Le contexte de la maison remplie d’enfants à toute heure de la journée ne s’y prête pas. Le train de vie a beau être ralenti, il n’y a pas tellement de silence chez nous… La messe à la maison, ne nous réussit pas trop non plus. Nous avons essayé la messe télévisée, ou via YouTube, mais trouvons que cela n’a pas la même portée. Les enfants décrochent complètement. On n’insiste pas. On réalise l’importance de nous déplacer, physiquement, pour se rendre dans un endroit de prière (et de silence), et l’importance de l’assemblée en chair et en os autour de nous.
Et tout ça me manque. Lors de la messe du dimanche je rechargeais mes batteries de foi, je recevais un nouvel élan pour ma prière personnelle en semaine, comme une source d’énergie. Là je n’ai plus été à la source depuis 8 semaines.
Fameuse expérience ce confinement.
Je voudrais prendre exemple aux enfants, qui ne se posent pas autant de questions, qui ne se soucient pas de demain et prennent tout cela avec plus de légèreté.
Bien entendu, nous passons aussi des moments formidables confinés tous les six. De nouvelles routines et petites traditions se sont inventées, comme l’apéro du vendredi soir. Le week-end, les grandes balades à vélo, des soirées films ou jeux de société – des choses que nous n’avions que rarement l’occasion de faire avant. Nous mangeons en famille trois fois, voire quatre fois par jour. Tous les jours. Au-delà du télétravail, on a du temps pour jouer et parler ensemble. Ce sont autant de cadeaux offerts.
Malgré les discordes, Fabien et moi trouvons également plus de temps pour parler et nous allons parfois nous promener en fin de journée, juste à nous deux. Quel bonheur et quelle découverte. J’essaie de m’accrocher à ces bienfaits là et de lâcher prise sur toutes les choses qui marchent moins bien en ce temps de confinement.
De tout cœur avec vous tous,
Stephanie.